[Image][Image]PARIS : des ponts et des moins ponts [Image]


Voici le compte rendu de la conférence du Samedi 14 Juin 2014 (96 ème du nom) 
"PARIS : Des ponts et des moins ponts"
avec Sandra PALEOLOGOS
de l'association Pégasus Découvertes

à la Médiathèque René CASSIN Salle Albert DERRIEN

(par Didier )


Sandra est revenue !

Comme à l'accoutumée, elle a enchanté son auditoire, non seulement avec son savoir, mais également ses talents d'oratrice et de conférencière. Elle si proche de son public, au coeur d'or et la franchise déconcertante. Est-ce un don ou le fruit d’un travail acharné ? Peut-être les deux. En tout cas, elle nous a appris, comme ça, simplement, plein de choses ; car elle en connaît des anecdotes sur Paris, la Seine et tout ce qui suit !

Pour celles et ceux qui ne connaissent pas Sandra, retrouvez-la en balade dans Paris (elle anime des promenades à thèmes) ou assistez à l'une de ses conférences :
 Pégasus Découvertes    06 21 77 73 00 

On peut dire qu’elle nous a plongés (c'est le cas de le dire) dans le passé de notre Capitale !

La Seine, tout d’abord, dont 23 ponts parmi les 37 qui l’enjambent, sont classés au patrimoine mondial de l’Unesco.

Les tous premiers ponts étaient construits en bois ; face aux nombreux incidents dus notamment à la percussion des blocs de glace lors des hivers si rudes à l’époque, les parisiens du haut moyen âge décidèrent de les rebâtir en pierre. Surprenant : les mentalités de l’époque étant si fébriles, il fallait, lors de l’inauguration d’un nouveau pont, le faire… exorciser. Dame, chacun croyait que la prouesse technique qui permettait à ce lourd édifice de tenir en place venait de Satan en personne.

Sandra nous explique ensuite que tous les ponts, et ce, durant des siècles, furent pourvus de maisons individuelles, souvent nombreuses. Il était même, paraît-il, impossible, lorsque l’on passait dans Paris, de savoir si on marchait dans une rue ou sur un pont ! Forte densité ; ce qui ne manqua pas, au cours de l’histoire, de créer de célèbres catastrophes.

Sandra nous présente ensuite son plan, regrettant, faute de temps, de ne pouvoir évoquer la totalité des ponts parisiens. Son choix est dès lors vite fait : ce sera un conférence non pas « géographique ou linéaire », mais historique.

Tout d’abord les ponts dans l’Antiquité :

Le premier des ponts est celui nommé le PETIT PONT

Passerelle de bois dès – 53 avant Jésus Christ, c’est grâce à lui que des siècles de lutéciens, puis parisii purent se rendre sur l’île Saint Louis, voire l’île de la Cité, où se trouvait à l’époque le palais du Roi. Sandra nous raconte même que ce pont était si fréquenté qu’on y institua un péage (déjà !). Seuls les bateleurs, troubadours et autres montreurs d’ours ou d’animaux rares, venus pour distraire la Cour, étaient exemptés de paiement. Évidemment, il fallait prouver ses capacités, si bien que les gardes demandaient à ces individus de … et c’est de là que vient l’expression : « payer en monnaie de singe ».

Le PETIT PONT fut détruit plusieurs fois au Moyen âge et même au 18ème siècle. Ainsi est resté célèbre l’incendie de 1718, au cours duquel, un bateau rempli de paille ayant pris feu dans le port proche de la Tournelle, les habitants (Houps !) détachèrent les amarres de cette embarcation qui, courant oblige, se dirigea tout droit vers le PETIT PONT, provoquant un sinistre qui dura trois jours et détruisit, outre les maison sur le pont, une bonne partie du quartier.

Si vous voulez apprendre bien d’autres anecdotes sur ce PETIT PONT et ses environs, je vous rappelle que Sandra le fait visiter, lors de la  balade qu'elle organise au départ de NOTRE-DAME toute proche (de Lutèce à PARIS)


Voici LE PONT AU CHANGE,

lui aussi affublé de maisons et, fait exceptionnel, initialement pont double puisque accolé au PONT AUX MENIERS, (nommé ainsi en raison de moulins s’y trouvant).

Sandra nous dit qu’au 12ème siècle, le roi de l’époque, Louis VII, y établit des échanges en  tous genres : artisans de luxe, banquiers, orfèvres. Si bien que ce  pont était somptueux et propice au commerce (je ne sais si les japonais et  riches émirs y venaient déjà ; j’en doute !).

Toujours est-il que ce pont fut longtemps celui par lequel les rois, reines et personnalités en visite entraient dans Paris.
Ainsi en 1389, l’arrivée solennelle d’Isabeau de Bavière épouse de Charles VI
 

Lui aussi, détruit par une gigantesque crue puis un incendie au 17ème siècle, il fut reconstruit sans maisons. Le baron Haussmann le rebâtit tel qu'on le voit aujourd'hui en 1853. Au Musée CARNAVALET, se trouvent tout un tas d’objets archéologiques récupérés au pied des piles, lors des fouilles de consolidation.

 

Le PONT NOTRE-DAME

 

Fin 15ème siècle, pourvu de 60 maisons ! Sa beauté supplanta en 1507 le PONT AU CHANGE. On disait alors qu’il était le plus beau pont de France. C’est par le pont  NOTRE-DAME que François Ier faisait ses entrées solennelles. On y programmait de grandes joutes nautiques.

Paris, chose peu banale, manqua souvent et cruellement d’eau pour ses fontaines ; si bien qu’on construisit sur plusieurs ponts, - dont celui-ci - de grandes pompes. Des tours énormes contenant tout un tas de machineries et autres tuyauteries compliquées.

Ce n’est qu’au début du 19ème siècle, que Napoléon rendit superflu ce système d’irrigation, en développant le réseau des canaux que l’on connaît aujourd’hui (canal de l’Ourcq, Saint-Martin etc.).

En 1919 le Pont NOTRE-DAME fut rebâti, avec deux arches historiques, plus une seule bien large pour que puissent passer les péniches et bateaux de croisière (avec des touristes japonais ; là je confirme !).

 
Le PONT NEUF,

 

pensé par Henri II, puis Henri III, mais finalement construit par Henri IV, fut témoin des grandes guerres de religion catholiques / protestants. Sandra nous explique qu’on le nomma durant plusieurs siècles le « pont aux pleurs » car Henri III, touché par la mort, la veille, de deux de ses mignons, apparut lors de la pose de la première pierre entièrement vêtu de noir, le visage triste (et les joues blêmes !).

C’est le premier pont parisien dont les piles ont été décorées et toujours restaurées  (384 mascarons, dont certains originaux se trouvent au Musée CARNAVALET)

- C’est également le premier pont construit dès l’origine SANS maisons (Henri IV – nous apprend Sandra – désirant que la vue, depuis la galerie du Louvre, ne soit pas entravée).

C’est le premier à posséder des trottoirs pour les piétons.

Il fut à cette époque le centre névralgique de Paris, devenant lui aussi l’entrée officielle des personnalités. Peuplé de petits commerces en tous genres, d’une vingtaines de boutiques étonnantes : tondeur de chiens, arracheur de dents… Il ne tarda pas à devenir insalubre. Une fois encore, HAUSSMANN lui régla son compte en 1855 en détruisant ces officines.

Fait original et qui ravit notre assemblée attentive : Sandra nous apprit que dans la statue équestre d'Henri IV qui trône sur ce pont, et qui fut restaurée en 2004, on découvrit un ... vrai trésor !

Il faut dire que les architectes constructeurs ont pour coutume, paraît-il, de camoufler (comme dans les pyramides) des objets insolites que découvrent quelques siècles plus tard les rénovateurs. Il fut donc confié, en 2004, à la Bibliothèque nationale, tout un tas de documents hétéroclites originaux : des médailles à l'effigie de Louis XVIII, le livre racontant l'histoire du roi Henri IV le grand etc.

Rappelons enfin que cette statue équestre érigée en 1616 fut la première œuvre présentée « ailleurs que sur un pont lui-même », et qu'elle fut également rénovée en 1818.

Le PONT MARIE,

nommé ainsi, non par référence religieuse, mais en l'honneur de l'ingénieur-entrepreneur Christophe Marie qui le construisit au 17ème siècle (se ruinant au passage pour financer ces travaux privés), Ce pont, comme bien d'autres, fut détruit par des congères de glace, (fréquents à l'époque) comme il a déjà été dit, puis reconstruit.

Le PONT MARIE fête en 2014 ses 400 ans !

Sandra évoque ensuite les passerelles, que par humour, dans le titre de sa conférence, elle nomme les « moins ponts », C'est en 1804 que fut construite la première de ces passerelles : 

le PONT DES ARTS,

 

réservé uniquement aux piétons, Nommé ainsi car reliant le palais des arts – le Louvre, à l'Institut de France siège de l'académie des Beaux Arts, il attira, le jour de son inauguration,
plus de 65 000 personnes !

Décoré avec des arbres en caissons, buissons et fleurs, il ressemblait à des jardins suspendus, Pour la petite histoire, Gérard de Nerval le qualifia de « Terrasse enchantée », Sa notoriété prit soudainement fin, lorsqu'un plaisantin laissa entende qu'il entendait « des craquements ».
Bombardé en 1918 puis 1944, détruit en 1949, l'ancien président Jacques CHIRAC l'inaugura de nouveau en 1984, Ce pont est de nos jours mondialement connu, puisque des amoureux du monde entier (ou de cyclistes...) ont accroché sur ses parapets des milliers de cadenas,
Cette tradition (initiée par des russes) devient d'ailleurs, même si originale, extrêmement dangereuse et ce, à divers titres :

- Le poids des cadenas métalliques devient insupportable pour les rambardes, et le pont lui-même.
- Les clés jetées dans la Seine provoquent une pollution inattendue,
- Les lieux étant absolument « complets », cette coutume gagne d'autres lieux... voire la Tour Eiffel elle-même...

Le PONT DU CARROUSEL,

donnant sur la Cour des Tuileries, à la place d'un ancien bac. Pont en arc et surtout, grande innovation pour l'époque  (1834), en fonte ! (son concepteur, monsieur POLONCEAU). 

Sandra nous dit que ce pont en fonte, formé "d'arches avec anneaux" créa polémique. Nombreux étant ses détracteurs. Il fut reconstruit en pierre en 1930.

Le voici à l'origine :

Ce pont est également connu pour ses lampadaires, lesquels, autrefois, étaient télescopiques. Ils mesuraient entre 13 mètres la nuit et 29 le jour, ceci afin de ne pas déranger l'éclairage du Louvre proche, tout en permettant aux passants d'y voir clair. 

Hélas cet éclairage fort sophistiqué ne fonctionna guère au cours des ans. Ce n'est qu'en 1999, afin de basculer dans le 21 ème millénaire,que l'on fit des travaux de rénovation
(1 million 200 mille euros...).
Paris, ville - lumière oblige !

Le PONT ALEXANDRE III,

 

réputé être de nos jours le plus beau pont de la Capitale !

Symbole de la puissance de la République (1887). Le président Félix Faure l'inaugura, en présence de l'empereur de la grande Russie Nicolas II et de son épouse (touché que l'on ait donné à ce pont merveilleux, le nom de son père Alexandre III).

On aperçoit, au loin le Grand Palais.

Il fut achevé et inauguré durant l'Exposition Universelle de 1900 (Expositions - nous précise Sandra -, qui eurent cours de 1855 à 1937).

Un pont richement décoré :

Sandra évoque ensuite la passerrelle Louis Philippe, le bateau-lavoir, la passerelle d'Arcole, l'Ecluse de la monnaie, pour nous présenter, de façon inattendue, des faitsinsolites vus sur les ponts... et surtout dessous :

- Un sous-marin sur les quais durant la guerre de 1914 ; un autobus tombé dans la Seine, les berges du fleuve, encore à l'état de chantier. Quelle différence avec, de nos jours, ces bords propres et sans chemins de terre boueux !

Vient  ensuite l'évocation des grandes crues.

Les plus célèbres sont celles de 1658 (j'étais jeune à l'époque mais je m'en souviens encore !) et 1910 (D'autres, moins fortes, ont cependant modelé le paysage de Paris : 1740, 1802).

Une discussion s'engage alors dans la salle, entre Sandra, madame PUTEAUX (mon amie corézienne) et Marianne (notre aviatrice octogénaire !) et qui racontent à leur tout des anecdotes qu'elles ont vécues : la Seine gelée, les durs moments de la guerre !

Quel plaisir pour l'assistance d'apprendre en direct les choses intéressantes, mais également de voir Sandra s'occuper gentiment de ces ... mamies attachantes !

Pour conclure, voici le PONT DE L'ALMA avec son Zouave ...qui fait peur à tout le monde lorsqu'il a la culotte qui mouille ! 

Sous ce pont, construit en 1856, refait en 1960, c'est en effet le Zouave (nom provenant des unités françaises d'infanterie légère appartenant à l'Armée d'Afrique sous le Second Empire)
qui donne la hauteur des crues de la Seine.

Cote de vigilance à 2,50 mètres (à ses pieds), il atteignit 8,62 mètres en janvier 1910. 

Une fois encore cette conférence fut un grand moment de culture, de surprises et d'amitié. Merci Sandra pour ces instants magiques, toi le pont (si j'ose dire) entre le passé et le présent, les anciens et la jeunesse !

Comme à l'accoutumée, nous nous sommes retrouvés à quelques uns au restaurant franco-indien où le dîner fut excellent, et l'ambiance chaleureuse (le Soleil étant également de la partie) .

Un petit coucou à Agnès, Juliette et David (... à Sacha également, petit bébé né ces jours-ci), ainsi qu'à tous les présents à cet avant-dernier b'art des sciences...

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